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DU VENDREDI 2 AOÛT (19 H) AU LUNDI 12 AOÛT (14 H) 2002



TEXTIQUE : L'INTERSCRIT (PREMIERS PROBLÈMES)


DIRECTION : Jean RICARDOU

ARGUMENT :

La textique? Une discipline nouvelle visant à établir une théorie unifiée des structures de l’écrit, classique et moderne, dans ses diverses modes (schémique, grammique, iconique, symbolique).

Ses avantages? Pour la théorie: une coordination conceptuelle de mécanismes plus ou moins bien pensés jadis, et naguère (dont l'expressivité), une critique résolue de certaines notions trop admises (dont la polysémie), ainsi qu’une réévaluation concertée de phénomènes négligés, voire méconnus (dont les phénomènes liés aux places), et une classification réfléchie de toutes les erreurs possibles (dont les répétitions malheureuses et les omissions calamiteuses). Pour la pratique: sur la base de la cardinale notion de lieu, une analyse inédite, attentive, notamment, aux prétendues broutilles, ainsi que la possibilité de programmes et métaprogrammes d’écriture raisonnés permettant la correction à plusieurs. En général: une clarté et une rigueur neuves, dans l'ordre de l’écriture et des concepts, quant à l'invention et à l'enseignement.

Sa méthode? Explorer par niveaux l'ensemble des structures loisibles, leurs problèmes et leurs effets, selon des matrices exhaustives à stipulation croissante, réfutables à mesure, le cas échéant, par tout contre-exemple analysé comme tel.

Le thème? L'on examinera spécialement, cette année, les problèmes liés à l'interscrit entendu comme, au plus modeste, ensemble d'écrits distincts associés.

Le travail? Sur la base des contributions expédiées à l’avance, l’on discutera toutes questions à tous égards soulevées.

Les participants? Celles et ceux que le champ ainsi balisé et le travail du coup permis intéressent, et qui, sachant que le début du séminaire sera consacrée à un recyclage à partir des documents adéquats, désirent venir à titre de participants actifs ou d'auditeurs curieux ; mais aussi, divers texticiens, et plusieurs chercheurs qui, sans s’inféoder à la textique, souhaitent prendre ou reprendre contact en présentant des travaux.

Les séances? En guise d’initiation ou de révision, un retour, pendant plusieurs séances, sur la méthode et les enjeux. Puis le traitement des questions annoncées. Et non moins, chaque jour, en vue d’unir, ainsi qu'il sied, la théorie et la pratique, un atelier d’écriture, élémentaire, prolongeant la série ouverte en 1984-86 au Collège International de Philosophie à Paris.

L'inscription? Il est souhaitable de l'accomplir au plus tôt, et en tout cas avant le 15 mai, pour bénéficier du précoce envoi des écrits préparatoires.

CALENDRIER DÉFINITIF :

Vendredi 2 août
Après-midi:
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée:
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Samedi 3 août
Matin:
Gilles TRONCHET: Un aperçu théorique (B)

Après-midi:
Gilles TRONCHET: Un aperçu théorique (B)


Dimanche 4 août
Matin:
Bernardo SCHIAVETTA: Objections à la textique (C)

Après-midi:
Jean RICARDOU: Unification fondamentale (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Maurice de Gandillac)


Lundi 5 août
Matin:
Jean RICARDOU: Unification fondamentale (B)

Après-midi:
Jean RICARDOU: Condition, composition, connexion (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Maurice de Gandillac)


Mardi 6 août
Matin:
Daniel BILOUS: Une réplication ambiguë: les anagrammes (B)

Après-midi:
Daniel BILOUS: Une réplication ambiguë: les anagrammes (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Maurice de Gandillac)


Mercredi 7 août
Matin:
Gilles TRONCHET: Lignes de partage (B)

Après-midi:
Gilles TRONCHET: Lignes de partage (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Frédéric Giloux)


Jeudi 8 août
Matin:
Dolorès VIVERO: La pièce redémontée (B)

Après-midi:
Dolorès VIVERO: La pièce redémontée (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Frédéric Giloux)


Vendredi 9 août
Matin:
Michel SIRVENT: Sur quelques variétés d'interscrits (B)

Après-midi:
Michel SIRVENT: Sur quelques variétés d'interscrits (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Frédéric Giloux)


Samedi 10 août
Matin:
Jean RICARDOU: Intelligibilité structurale de l'écrit (B)

Après-midi:
Jean RICARDOU: Intelligibilité structurale de l'écrit (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture (écrit de Frédéric Giloux)


Dimanche 11 août
Matin:
Jean-Claude RAILLON: Un interscrit autocritique (B)

Après-midi:
Jean-Claude RAILLON: Un interscrit autocritique (B)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Lundi 12 août
Matin:
Présentation du Cortex
Questions d'ensemble

Après-midi:
DÉPART DES PARTICIPANTS

(B: Base ; C: Contact)

RÉSUMÉS :

Daniel BILOUS: Une réplication ambiguë: les anagrammes
Classiquement définie (par Littré) comme la "transposition de lettres, qui d'un mot ou d'une phrase fait un autre mot ou une autre phrase", l'anagramme connaît de nombreuses variétés. On en limitera l'examen à une seule espèce, le quasi genre littéraire auquel la pratique a donné lieu, et que l'on définira pour l'essentiel ainsi: la dérivation d'une formule depuis un patronyme plus ou moins célèbre, ladite formule fonctionnant dès lors plutôt comme un jugement, une vérité sur (et parfois une virtuelle devise pour) l'individu en question. Et l'on examinera en praticien dudit genre, soucieux de vérifier ou d'infirmer les intuitions de l'empirie technique au contact des instruments de la théorie textique.
L'hypothèse est la suivante: lorsqu'un patronyme voit son matériau grammique redisposé pour donner un avatar verbal (acceptable ou non en langue), la réplication est au départ descriptible à partir de ce que la textique nomme interscrit. Toutefois, le caractère interscriptuel de l'anagramme se trouve presque toujours d'emblée masqué par ce que l'on appellera une visée formulaire, elle massivement rhétorique, qui prédétermine la sélection de l'avatar parmi tous les autres combinats possibles. Dès que choisie, la formule associant la base patronymique et son avatar transforme le duo interscriptuel en un seul et même écrit, dont l'orientation, quant à la visée représentative, demeure ambiguë.

Jean RICARDOU: L'interscrit (condition, composition, connexion)
L'on se propose d'appeler interscrit, au plus humble, tout ensemble d'écrits distincts quand ils se trouvent associés, et l'on envisage, à cet égard, d'examiner trois problèmes: la condition, la composition, la connexion.
Par condition de l'interscrit, l'on entendra la situation qui permet d'envisager la possibilité même de l'interscrit. En effet, sauf à s'en remettre, ainsi que trop souvent, à un empirisime naïf, il sied de substituer, à ce que d'aucuns acceptent comme un "donné", ce qui pourrait bien mériter le nom de "construit".
Par composition de l'interscrit, l'on entendra la procédure qui permet la prise ensemble de divers écrits distincts. En effet celle-ci peut être aléatoire ou arbitraire (et ressortir lors au diktat) ou motivée (et relever lors du principe).
Par connexion de l'interscrit, l'on entendra la précaution qui permet la mise ensemble de divers écrits distincts. En effet, selon l'espèce du principe de composition, la mise ensemble, sauf à risquer d'être ineffective pour tel lecteur, demandera souvent un surcroît de soin.
C'est, pour l'écrit schémique (à savoir, par abus de simplification, l'écrit constitué de "figures" exemptes d'effets de représentation), et pour l'écrit grammique (à savoir, par abus de simplification, l'écrit constitué de "lettres" et provoquant des effets de représentation), que seront examinés ces problèmes.

Bernardo SCHIAVETTA: Objections à la textique
Il me semble que je peux opposer à la textique au moins trois objections fondamentales, car, pour une discipline qui se veut "exhaustive", elles impliquent la mise à l’écart d’aspects fondamentaux du texte.
1) Son parti pris pour une "lecture à la loupe" matérialiste, méconnaît la pragmatique de textes qui ne sont pas écrits pour être lus de la sorte ; autrement dit, en regardant le texte comme objet et non comme discours, la textique méconnaît les règles pragmatiques de sa production et de sa réception ; elle tombe ainsi dans la surinterprétation formelle.
2) De ce premier parti pris il résulte un anti-intentionnalisme radical, qu’elle partage avec d’autres tendances de la critique textuelle (Wimsatt et Beardsley, Barthes, Derrida, etc.) ; or en privilégiant la signification et l’énoncé au détriment du sens et de l’énonciation du texte, elle finit par le méconnaître comme fait de communication ; elle tombe ainsi dans la surinterprétation sémantique.
3) Son parti pris pour la complétude des structures servant à ce qu’elle appelle la "représentation", écarte les esthétiques de l’incomplétude (la modernité iconoclaste) ; elle tombe ainsi dans la normativité crypto-classique.
Ces objections me semblent devoir déboucher sur une mise en question de la vocation de la textique: elle devrait se proposer, de manière plus réaliste, comme une technique normative d’écriture et de lecture, seulement valable pour les textes produits selon ses normes de production et de réception.

Michel SIRVENT: Sur quelques variétés d'interscrit
On abordera l'interscrit à partir de l'un des secteurs qui le composent. Ce secteur, on l'appellera interscrit citationnel. On reviendra à ce propos sur la distinction entre inter(intra)scrit et inter(extra)scrit présentée au séminaire 2001.

Gilles TRONCHET: Lignes de partage: d'interscrit en intrascrit
Si, par exemple, on observe deux écrits, disposés au voisinage l'un de l'autre, dans tel volume, et que l'on distingue entre eux certaines structures communes, on analysera celles-ci, en textique, comme des interscriptures ou des intertextures, au sein d'un interscrit. D'emblée, une telle dichotomie, parce qu'elle repose nécessairement sur une analyse des divers aspects que présentent des écrits, mais surtout parce qu'elle vise à une prise en compte exhaustive de leurs possibles relations, permet un gain théorique appréciable par rapport aux critères plutôt flous de l'approche couramment nommée intertextuelle. Cependant, il reste à vérifier l'autonomie des deux objets, faute de quoi les structures ainsi dégagées relèveraient finalement de l'intrascrit, les deux écrits préalablement retenus se révélant du coup deux fragments d'un écrit plus vaste.
Le problème qu'abordera la contribution sera donc celui des critères qui peuvent servir à opérer le partage entre les domaines intra et interscriptuels. Il conviendra de rechercher si la frontière est à concevoir comme une démarcation exclusive ou comme une distinction relative, tributaire de découpes particulières au sein du réel, tantôt isolant, tantôt conjoignant des éléments qui appartiennent en fait à un continuum. Cela suppose d'envisager comment s'effectue l'articulation entre des écrits a priori distincts, de manière à entraîner leur intégration dans un même ensemble, que cela se produise sur une base lectorale, à travers les rapprochements pratiqués, ou bien scripturale, par le biais des agencements élaborés, capables de garantir la cohésion d'un corpus.
Une telle démarche conduit à s'interroger sur le statut des objets scripturaux voués à réunir du divers, tels que les différents types de recueils, les séries d'ouvrages, les continuations narratives ; elle implique de problématiser la notion couramment admise d'œuvre, pour n'y voir qu'une émergence empirique particulière dans ce qu'il importe à la théorie de situer en regard des lignes de partage propres à caractériser les statuts respectifs de l'interscrit et de l'intrascrit.

Dolorès VIVERO: La pièce redémontée
L'on tentera de procéder à la récriture d'un travail centré sur les relations d'équivalence sémantique partielle dans l'écrit. L’étude porte fondamentalement sur les conditions nécessaires pour que ces relations soient perceptibles à la lecture. Ces conditions, de même que les modalités d’apparition de ces structures, seront étudiées en fonction du rapport entretenu avec la représentation que l’écrit permet de construire. Il faudrait ainsi, pour être perceptibles, qu’elles ne soient pas exigées par la cohérence représentative, mais il faudrait, pour apparaître en tant que contrainte déterminant l’effet de représentation, qu’elles soient indépendantes vis-à-vis de celui-ci ; entre ces deux cas de figure, l’on tentera d’étudier celles qui s’affichent en tant qu’agencements contribuant à l’effet de représentation suscité par l’écrit. Cette réflexion prendra pour exemple la célèbre description de "la pièce montée" de Madame Bovary.


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