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DU LUNDI 1er AOÛT (19 H) AU JEUDI 11 AOÛT (14 H) 2005



TEXTIQUE : L'INTERSCRIT (AFFINEMENT DE L'EXHAUSTION)


DIRECTION : Jean RICARDOU

ARGUMENT :

La textique? Pour le moins, une discipline nouvelle inaugurée en 1985 au Collège International de Philosophie de Paris, visant à établir une théorie unifiée des structures de l’écrit, classique et moderne, dans ses divers modes (schémique, grammique, iconique, symbolique).

Ses avantages? Pour la théorie: une coordination conceptuelle de mécanismes plus ou moins bien pensés jadis, et naguère (dont l'expressivité), une critique résolue de certaines notions trop admises (dont la polysémie), ainsi qu’une réévaluation concertée de phénomènes négligés, voire méconnus (dont les phénomènes liés aux places), et une classification réfléchie de toutes les erreurs possibles (dont les répétitions malheureuses et les omissions calamiteuses). Pour la pratique: sur la base de la cardinale notion de lieu scriptuel, une analyse inédite, attentive, notamment, aux prétendues broutilles, ainsi que la possibilité de programmes et métaprogrammes d’écriture raisonnés permettant la correction à plusieurs. En général: une clarté et une rigueur neuves, dans l'ordre de l’écriture et des concepts, quant à l'invention et à l'enseignement.

Sa méthode? Explorer par niveaux l'ensemble des structures loisibles, leurs problèmes et leurs effets, selon des matrices exhaustives à stipulation croissante, réfutables à mesure, le cas échéant, par tout contre-exemple analysé comme tel.

Le thème? L'on affinera, cette année, l'intégrale distribution ordonnée de l'interscrit, celui-ci entendu, au plus modeste, et au moins infructueux peut-être, comme tout ensemble d'écrits distincts associés, puis on examinera, divers, certains problèmes spécifiques.

Le travail? Sur la base des contributions expédiées à l’avance, l’on discutera toutes questions ci-dessous à tous égards soulevées.

Les participants? Celles et ceux que le champ ainsi balisé et le travail du coup permis intéressent, et qui, sachant que le début du séminaire sera consacrée à un recyclage à partir des documents adéquats, désirent venir à titre de participants actifs ou d'auditeurs curieux, mais aussi, certes, divers texticiens, et plusieurs chercheurs qui, sans s’inféoder à la textique, souhaitent prendre ou reprendre contact en présentant, soit des objections, soit des travaux.

Les séances? En guise d’initiation ou de révision, un retour, pendant plusieurs séances, sur la méthode et les enjeux. Puis le traitement des questions annoncées. Et non moins, chaque jour, en vue d’unir, ainsi qu'il sied, la théorie et la pratique, un atelier d’écriture, élémentaire, prolongeant la série ouverte en 1984-86 au Collège International de Philosophie à Paris.

L'inscription? Il est souhaitable de l'accomplir au plus tôt, si possible avant le 15 mai, pour bénéficier du précoce envoi des écrits préparatoires.

CALENDRIER DÉFINITIF :

Lundi 1er août
Après-midi:
ACCUEIL DES PARTICIPANTS

Soirée:
Présentation du Centre, du colloque et des participants


Mardi 2 août
Recyclage
Matin:
Jean RICARDOU: Unification fondamentale de l'écrit

Après-midi:
Gilles TRONCHET: Un aperçu de la textique

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Mercredi 3 août
Recyclage
Matin:
Gilles TRONCHET: Un aperçu de la textique

Après-midi:
Jean RICARDOU: Unification fondamentale de l'écrit

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Jeudi 4 août
Contacts
Matin:
Marc AVELOT: Divergences (tentative d'exposition d'un écart)

Après-midi:
Bernard LAMIZET: Sémiotique de la médiation textuelle: esthétique et politique

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Vendredi 5 août
Bases
Matin:
Daniel BILOUS: Problèmes textiques du centon

Après-midi:
Daniel BILOUS: Problèmes textiques du centon

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Samedi 6 août
Contacts
Matin:
Bernardo SCHIAVETTA: L'interscrit: propositions centonales

Après-midi:
Jany BERRETTI: L'aventure de l'interscrit

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture

Soirée latérale:
Sandra SIMMONS: Présentation de "Margelles"
Bernado SCHIAVETTA: Présentation du projet RAPHEL


Dimanche 7 août
Bases
Matin:
Jean RICARDOU: Grivèlerie (sur un inter(caco)scrit)

Après-midi:
Jean RICARDOU: Grivèlerie (sur un inter(caco)scrit)

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Lundi 8 août
Bases
Matin:
Myriam LABADIE: Elaboration d'un interscrit générique: tout cet Escher qui n'est pas rare

Après-midi:
Myriam LABADIE: Elaboration d'un interscrit générique: tout cet Escher qui n'est pas rare

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Mardi 9 août
Bases
Matin:
Jean RICARDOU: Exhaustion affinée de l'interscrit

Après-midi:
Jean RICARDOU: Exhaustion affinée de l'interscrit

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Mercredi 10 août
Bases
Matin:
Gilles TRONCHET: Traduire à la lettre

Après-midi:
Gilles TRONCHET: Traduire à la lettre

Vers 18 heures:
Atelier d'écriture


Jeudi 11 août
Matin:
Jean RICARDOU: Intelligibilité structurale de l'écrit

Après-midi:
DÉPART DES PARTICIPANTS

RÉSUMÉS :

RECYCLAGE

Sitôt, d'une part, que la textique vise à établir une théorie unifiée des structures de l'écrit dans ses divers modes (schémique, grammique, iconique, symbolique), ce qui la voue à une exhaustivité contrôlée sur un domaine immense, et sitôt, d'autre part, que ses premiers efforts, comme tels, datent du milieu des années quatre-vingt, nul doute qu'à l'orée du prochain séminaire se posent deux problèmes.
Celui de la révision, qui concerne les participants habitués, voire chevronnés, car il est opportun, avant ces journées de réflexion intensive, de se remettre en tête, soigneusement, les grandes lignes du travail.
Celui du recyclage, qui concerne les participants nouveaux qu'une curiosité intellectuelle aura porté à venir pour la première fois, car il est nécessaire pour bien saisir la pensée textique, voire pour y concourir, d'être mis en possession, aussi soigneusement que possible, de la méthode et des enjeux.
Cette révision et ce recyclage se feront en deux phases à partir des fascicules remis à jour pour 2005: Un aperçu de la textique par Gilles Tronchet, et Unification fondamentale de l'écrit par Jean Ricardou.
La première phase relève de la lecture: les deux fascicules étant expédiés, avec d'autres écrits, dans le courant de juin, les participants auront tout le loisir qu'ils s'accorderont pour en prendre connaissance à leur guise.
La deuxième phase ressortit à la discussion: les deux premières journées du séminaire étant réservées à de libres échanges oraux sur ces deux fascicules, les participants auront tout le loisir permis par les séances pour solliciter les éclaircissements éventuellement nécessaires, voire pour énoncer, très librement, de premières objections (JR).

Jean RICARDOU: Unification fondamentale de l'écrit (évolution 2005)
Si la textique peut envisager, d'emblée, une exhaustion des structures de l'écrit quel soit-il, c'est qu'elle procède par niveaux, du plus général au très particulier, en offrant, pour chacun d'eux, une matrice d'établissement sans reste. Ce sont deux choses distinctes qui deviennent lors possibles. La première, c'est, à tel niveau déterminé, de ne point laisser la moindre zone d'ombre. La deuxième, puisqu'il suffit de montrer qu'une occurrence concevable n'est pas incluse dans les matrices pour objecter, c'est de programmer, à chaque niveau, une réfutation éventuelle.
Le fascicule Unification fondamentale présente, notamment, les  deux plus générales matrices d'exhaustion textique, avec leurs divers concepts associés: la matrice modale et la matrice structurale.
+++
La matrice modale est d'allure arborescente.
D'abord un tronc commun, les schèmes, entendus comme "les zones déterminées dans un champ par au moins un différentiel".
Puis une première ramification, avec, d'une part, les grammes, ou "schèmes capables de représenter en ce que diversement liables aux sons d'au moins une langue selon certaines suites déterminées, ils permettent, par le relais d'une accréditation reçue, que s'ajoute, pour un récepteur donné, une autre idée à celles que l'on peut se faire d'eux-mêmes", et, d'autre part, les icônes ou "schèmes capables de représenter en ce que, sans devoir être liés aux sons d'une langue, ils comportent, pour un récepteur envisagé, au moins un caractère déterminant de tel objet, ou type d'objet, concret ou abstrait, réel ou fictif, vu sous quelque angle, et dont l'idée, ainsi, s'ajoute à celle que l'on peut se faire d'eux-mêmes".
Enfin, une deuxième ramification, avec les symboles ou "schèmes capables de représenter en ce qu'ils permettent, par le relais d'au moins une accéditation, reçue ou convenue,  que s'ajoute, pour un récepteur envisagé, une autre idée à celles que l'on peut se faire d'eux-mêmes", et qui, selon la base (schémique, grammique, iconique) sur laquelle ils s'appuient, forment trois types: les schémosymboles, les grammosymboles, les iconosymboles.
L'hypothèse de l'exhaustion des modes présume lors qu'un écrit, quel soit-il, ne comporte jamais d'autres modes que le schémoscrit, le grammoscrit, l'iconoscrit et, sous ses trois variétés (le symbolo(schémo)scrit, le symbolo(grammo)scrit, le symbolo(icono)scrit), le symboloscrit.
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La matrice structurale (représentative) est d'allure tabulaire.
Elle porte un couple principal flanqué d'un couple associé.
Le couple principal est formé de l'orthoreprésentation, déclarée advenue "chaque fois que des schèmes permettent correctement que s'ajoute, pour un récepteur donné, une autre idée à celles que l'on peut se faire d'eux-mêmes, si celle-ci semble convenir à tel ou tel objet réel ou fictif, concret ou abstrait", et de l'orthométareprésentation, déclarée advenue "chaque fois que, de manière organique, transparaissent, au-delà du régime représentatif, les "moyens", matériels notamment, qu'en son ordinaire fonctionnement l'orthoreprésentation à la fois requiert et estompe".
Le couple associé est formé de la cacoreprésentation, déclarée advenue "chaque fois qu'un effet d'orthoreprésentation se trouve engagé et entravé", et de la cacométareprésentation déclarée advenue "chaque fois qu'un effet d'orthométareprésentation se trouve engagé et entravé".
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L'hypothèse de l'exhaustion structurale (représentative) présume lors que l'écrit représentatif ne se présente jamais sous d'autres structures que celles de l'écrit orthoreprésentatif (ou orthoscript), de l'écrit cacoreprésentatif (ou cacoscript), de l'écrit orthométareprésentatif (ou orthotexte), de l'écrit cacométareprésentatif (ou cacotexte).
C'est à une explicitation de ces catégories que procède le fascicule Unification fondamentale de  l'écrit, et c'est à une élucidation de tous les écrits, quels soient-ils, et dans leurs moindres aspects, que, à partir des concepts plus pointus qu'impliquent ces deux matrices (la matrice modale et la matrice structurale) la textique a pour mission de procéder.

Gilles TRONCHET: Un aperçu de la textique (version 2005)
Ce fascicule est réactualisé chaque année, de manière à prendre en compte les acquis de la discipline et les remarques ou objections faites par les participants au précédent séminaire. Il a une double visée: d'abord, offrir un historique succinct, pour montrer dans quelles conditions et selon quelles étapes la textique est apparue et s'est constituée en une discipline nouvelle ; ensuite, fournir un bref exposé des principaux outils conceptuels élaborés jusqu'à présent. Comme la textique se propose d'établir une théorie unifiée de l'écrit, il importe avant tout d'expliquer la conception très vaste qu'elle a de son objet et de préciser comment il trouve à se spécifier selon différents modes qui prennent en compte, notamment, les caractères alphabétiques, les images, les symboles. Ensuite, est retenu un domaine plus restreint et sans nul doute familier au lecteur, l'écrit représentatif relevant du mode grammique (ce qui correspond, pour simplifier, aux écrits basés sur des séries de lettres) : il s'agit d'inventorier les principales catégories qui permettent d'envisager de manière exhaustive les structures possibles dans un écrit grammique (la textique prétend y parvenir, en l'attente d'une éventuelle démonstration contraire, susceptible de relancer la recherche). Enfin, il a semblé utile de signaler quelques-uns des instruments analytiques servant à explorer en détail les dispositifs repérables dans un écrit. On admettra toutefois qu'un simple aperçu ne saurait avoir d'autre visée que de dispenser une information initiale et qu'une approche théorique plus fouillée, débouchant sur une pratique effective de la textique, exige de bien plus amples développements, lesquels sont engagés avec le document Intelligibilité structurale de l'écrit (par Jean Ricardou).



BASES

Daniel BILOUS: Problèmes textiques du centon
S’agissant d’écrire en mode grammique, il est permis de le faire dans le registre de l’interscrit, c’est-à-dire avec d’autres écrits à la fois distincts et corrélés.
Lorsque l’inter(grammo)scrit en jeu accueille des citations, il forme, pour la textique, un inter(grammo(co(endo)))scrit (du latin co, "avec", du grec endon, "en dedans") ; et lorsqu’il est sans reste composé de fragments d’écrits distincts mutuellement indépendants — ce qu’une tradition qui remonte à l’Antiquité gréco-latine appelle centon —, la textique y repère, selon sa propre technicité, une variété de la catégorie précédente: un inter(grammo(holo(co(endo))))scrit (du grec holos, "entier").
A partir d’exemples forgés, l’on examinera plusieurs sortes de problèmes:
- lié à l’orientation (représentative ou métareprésentative), celui des métamorphoses, à les supposer correctes, que prélèvement et collage peuvent infliger aux fragments mobilisés ;
- liés à l’accomplissement (ortho- ou cacoscriptuel), ceux de la construction des rapports: non seulement les relations scriptuelles entre les divers interscriptèmes que le collage aboute noir sur blanc, mais encore les relations interscriptuelles entre tel d’entre eux et l’écrit de base dont il procède.
L’ensemble de tels considérants soulève, à travers l’épineuse question du style, celles, conjointes, de la référence livresque, disons, sous l’angle de son éventuelle lecturabilité, et des degrés d’altération scriptuelle, calculables en fonction de l’intérêt (scriptural, textural) qu’offre le résultat.

Myriam LABADIE: Elaboration d'un interscrit générique: tout cet Escher qui n'est pas rare
L'interscrit générique, entendu comme un interscrit... d'interscrits, est familier dans le cadre de la "littérature" (laquelle, si on la suppose, appartient à ce que la textique nomme les écrits grammiques), où l'on n'hésite point à recourir aux notions de "genre" et de "forme fixe".
Ce concept semble en revanche improbable quant aux écrits plastiques, la reproduction d'une même contrainte d'exécution dans une infinie variété de résultats se heurtant au principe généralement admis de l'originalité stylistique du praticien.
Pourtant, certains travaux de Mauritz Cornelius Escher, en l'occurrence les "Remplissage périodique du plan" I et II, permettent de remettre en cause cette impossibilité supposée, et proposant une règle génératrice suffisamment forte, invitent à la réalisation d'écrits iconiques du même ordre.
Ce sont quelques-uns des problèmes liés à cette réalisation que l'on s'efforcera d'éclaircir.

Jean RICARDOU: Exhaustion affinée de l'interscrit
L'on persiste à nommer interscrit, au plus humble, tout ensemble d'écrits distincts quand ils se trouvent associés, et l'on se propose, aux fins d'une intelligibilité globale, d'en ordonner la cohue selon quatre sous-matrices d'exhaustion, dont les spécifications se combinent, ce qui permet, d'une part, une détermination précise des occurrences envisagées, d'autre part, conjointement, leur localisation dans l'ensemble théorique, enfin une mise au clair des problèmes qui leur sont inhérents.
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La sous-matrice d'exhaustion topographique distribue les écrits concernés à partir de leurs positions respectives. Sous cet angle, l'on distingue la pluralité (tout ensemble d'écrits distincts considérés indépendamment de leurs positions respectives), le recueil (tout commun lieu au sein duquel, selon la convocation, et tout en restant eux-mêmes mobiles, se trouvent enclos certains écrits distincts), le corpus (tout commun lieu au sein duquel se trouvent fixés certains écrits distincts), l'assignat (tout commun lieu au sein duquel se trouvent fixés au moins deux écrits distincts, dont l'un est, partielle ou intégrale, une copie de quelque autre).
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La sous-matrice d'exhaustion hiérarchique distribue les écrits concernés à partir du niveau de leur représentative indépendance. Sous cet angle, l'on distingue, techniquement, l'inter(isopédo)scrit (quand les écrits sont mutuellement indépendants) et l'inter(anisopédo)scrit (quand certains des écrits sont indépendants sans que le soient les autres).
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La sous-matrice d'exhaustion régimale distribue les écrits concernés selon que leur rapport relève des régimes de l'interreprésentation (l'on parle, techniquement, d'interscript) ou de l'intermétareprésentation (l'on parle techniquement d'intertexte).
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La sous-matrice d'exhaustion effectuative distribue les écrits concernés selon la réussite ou la défectuositté du rapport représentatif ou métareprésentatif noué. Quand il s'agit d'une réussite, l'on diagnostique un inter(ortho)scrit. Quand il s'agit d'une défectuosité, l'on diagnostique un inter(caco)scrit.
+++
Suivant l'hypothèse d'exhaustion, l'on postule, dès lors, que la combinaison de toutes les situations ainsi définies, et approfondies, chacune, avec les concepts adéquats, est capable d'offrir une intégrale distribution ordonnée de l'intercrit, et l'on construit, de lasorte, du moins l'estime-t-on, le loisir d'une réfutation, en permettant, de façon précise, l'éventuelle venue d'un contre-exemple analysé comme tel qui sache faire opposition.

Jean RICARDOU: Grivèlerie (sur un inter(caco)scrit)
En textique l'on procède, notamment, à une exhaustion topographique de l'interscrit, c'est-à-dire à la mise en évidence, sans reste, des diverses situations spatiales dans lesquelles peuvent se trouver au moins deux écrits distincts associés. L'on montre qu'elles se réduisent à quatre, respectivement dites: pluralité, recueil, corpus, assignat.
C'est dans un assignat, que l'on nomme, selon la cohérence théorique, l'inter(co)scrit, à savoir "tout commun lieu au sein duquel se trouvent fixés au moins deux écrits distincts, dont l'un, issu du dédoublement, partiel ou total, d'un écrit extérieur se trouve, effectivement ou virtuellement, recruté par un autre", que réside l'étrangeté que l'on se propose d'éclaircir.
Cette étrangeté se trouve dans la portion terminale, Le temps retrouvé, du roman A la recherche du temps perdu de Proust.
En effet, à tel moment, il est procédé à la citation d'un passage des Mémoires d'Outre-Tombe, où Chateaubriand évoque "le gazouillement d'une grive". Mais il se trouve, l'affaire semblant n'avoir pas été trop souvent perçue, que cette citation, non seulement est inexacte, mais encore est inexacte avec habileté.
L'on se propose donc d'analyser avec soin les détails de cette bizarrerie et d'en établir la raison par les offices d'un écrit bizonal, c'est-à-dire d'un écrit porteur de zones non techniques, lesquelles, parcourues d'un bout à l'autre par les lectrices et lecteurs novices, leur permettent de saisir, à bonne hauteur, l'intelligibilité d'un propos obtenu, il est vrai, avec plus de conscience, selon de scrupuleuses voies construites en théorie, et dont rendent compte les zones techniques destinées aux participantes et participants plus chevronnés.
(Cette étude sera dédiée à Martine Marzloff qui a repéré cette étrangeté en 2001, dans une fiche du Cercle Ouvert de Recherche en TExtique, mais qui n'a pas été en mesure, depuis, de faire fructifier les indications qui lui avait été suggérées)

Gilles TRONCHET: Traduire à la lettre
Les traductions associant des écrits, considérés dans une certaine mesure comme homologues dans des langues distinctes, forment une catégorie particulière de l'interscrit, et plus précisément l'inter(grammo)scrit (c'est-à-dire, en le formulant de façon plus laxiste, l'association d'écrits formés pour l'essentiel de caractères alphabétiques).
Il s'agira dans le travail en question d'observer un exemple étroitement délimité, un vers et l'amorce du suivant, extraits d'un recueil du poète latin Ovide et rapprochés d'une traduction courante, qui en offre un correct équivalent représentatif.
On s'intéressera d'abord à la détermination de la structure formée par le couple d'écrits ainsi pris en compte, puis on examinera les agencements particuliers que propose la traduction pour les confronter enfin avec le dispositif assez sophistiqué du passage original. Bien entendu, aucune compétence, même élémentaire, dans la langue latine n'est indispensable pour suivre l'analyse.
Cette comparaison devrait permettre de problématiser quelque peu les opérations qui s'effectuent lors de la transposition dans une autre langue et d'amorcer une comparaison avec celles que met en œuvre le lecteur lorsqu'il déchiffre un écrit dans sa propre langue.



CONTACTS

Marc AVELOT: Divergences (tentative d'exposition d'un écart)
Répondant à une sollicitation de Jean Ricardou, Divergences se développe autour de trois questions qui cherchent à expliciter les principales raisons de ma réticence à la textique.
La première concerne le projet de la nouvelle discipline et notamment son aspiration à faire science. Présente depuis le début des travaux de Jean Ricardou, cette ambition me paraît ne pouvoir s’établir qu’au prix d’une cécité sur les conditions de production de la textique et la disqualification d’une autre perspective que je désignerai par le néologisme de pathique.
La seconde touche à l’objet de la textique et notamment au destin de la pratique fictionnelle dans le nouvel ensemble théorique. Centrale, voire péremptoire, dans la première manière ricardolienne, l’injonction à écrire semble s’être peu à peu rabattue sur l’écriture théorique, ne laissant au désir d’œuvrer que l’exercice d’un RAPT ou la prolongation d’un Bestiaire. Cette restriction s’adosse à une dévalorisation de ce que je maintiendrai personnellement comme le prix de la littérature.
La dernière s’attache au sujet dans la textique et notamment aux multiples avatars d’une motion permanente chez Jean Ricardou: la métamorphose du scripteur. Dans cette période interminable de relâchement, la textique demeure l’une des rares constructions théoriques à ne pas abdiquer d’un rapport entre le comprendre et l’agir, entre la pensée et le changement. Cette exigence primordiale d’être conséquent forme toujours pour moi l’attrait du ricardolisme et le moteur de ma fidélité. Faute toutefois de prendre vraiment en compte le substrat nécessairement affectif de toute transformation humaine, l’engagement texticien me paraît régulièrement achopper aux mêmes écueils selon une répétition symptomatique que je m’efforcerai de situer.

Jany BERRETTI: L'aventure de l'interscrit
La textique définit l'"interscrit" comme la "prise ensemble d'au moins deux écrits distincts". On envisagera ici le recours à l'"interscrit" lors de l'"interreconscription".
Selon la méthode préconisée par la textique, toute analyse est fondée sur un préalable découpage, la "circonscription", qui délimite avec précision le fragment de l'"écrit" sur lequel, hors le reste, l'analyse va s'exercer. Elargir les contours de ce fragment, c'est procéder à une "reconscription". L'interreconscription" confronte le premier circonscrit à un autre fragment déterminé au sein d'un écrit distinct. On examinera la question posée par le choix de l'autre fragment, par ce bond — aventureux peut-être  — hors du premier découpat.

Bernard LAMIZET: Sémiotique de la médiation textuelle: esthétique et politique
0. La double médiation: entre réel, symbolique et imaginaire et entre singulier et collectif
La médiation du texte exprime deux médiations. La première est constitutive de la dialectique entre le réel de l’énonciation, le symbolique de la représentation et l’imaginaire de la fiction. La seconde est constitutive de la dialectique entre la dimension singulière de l’expérience du désir et la dimension collective de l’expérience du politique.
1. Information, événement, fiction
Les médias formulent une articulation autour de l’information et de l’événement dans le discours politique. La littérature formule une articulation esthétique autour de l’expérience du langage et de l’énonciation et de l’expérience de la fiction et de l’imaginaire.
2. L’information, la communication et la médiation du texte
La médiation du texte peut se penser comme une articulation esthétique de l’information (rapport au monde) et de la communication (rapport à l’autre).
3. Reformulation critique de l’identité du sujet
Cette articulation esthétique entre information et communication se fonde sur la reformulation de l’identité du sujet dans une articulation entre le sujet d’énonciation (expérience de l’écriture) et le sujet porteur de la sociabilité (expérience de la lecture).
4. La médiation  du texte comme distanciation critique au monde
Ce qui caractérise la médiation du texte, et, en particulier, ce qui la différencie par rapport aux autres formes de la médiation symbolique et de la médiation de l’information, c’est le fait que la médiation du texte institue une posture distanciée du lecteur et du scripteur par rapport au monde.
5. L’interscripture et l’engagement
Cette posture distanciée désigne une posture critique, légitimée au nom de la culture dont sont porteurs le scripteur et le lecteur (situation d’interscripture) et au nom de l’engagement qui fait d’eux des acteurs sociaux de l’espace public.

Bernardo SCHIAVETTA: L'interscrit: propositions centonales
A la demande de J. Ricardou, B. Schiavetta présentera son centon de fragments de Mallarmé: "Un éclat de ta voix" (première publication 1999). L'art du centon ("patchwork" en grec), dont la première formulation normative connue remonte à Ausone, est celui de composer un texte en juxtaposant exclusivement des citations. En reprenant des suites de mots d’autres textes, son écriture se fait donc par des choix de lecture-coupure (fragmentation) suivie d’un collage et, éventuellement, de l’utilisation d’autres types de coupure (ponctuation). Ce type de texte peut servir à interroger la textique sur les rapports complexes entre lecture et écriture dans le cadre de l’interscrit.



SOIRÉE

Sandra SIMMONS: Présentation de "Margelles"
Pour qu’il y ait interscrit, il faut qu’il y ait au moins deux écrits respectivement indépendants. Or, la série remet en question la frontière entre un "écrit clos" et un "écrit ouvert".
Un soir, les participants du séminaire qui s’estimeront intéressés auront l’opportunité d’effectuer des écrits à partir de morceaux icono-grammiques, qui leur seront donnés. Avec cette exploration des margelles (forme spéciale d’un écrit autour de la page), se posera, puisque ces écrits distincts feront intégrale partie d’une série, la question de l’indépendance. Devra-t-on considérer chaque nouvel écrit comme une entité indépendante ou comme une des pièces détachées d’un seul vaste écrit issu d’un programme répétitif? En opérant une analyse in situ, les texticiens volontaires mettront ainsi les paramètres de l’interscrit à l’épreuve.



ATELIER D'ÉCRITURE

Les règles du BESTIAIRE

Le travail quotidien en Atelier d'écriture se fera en deux phases sur la base d'un programme, lié à de précises considérations théoriques, mais qu'il est possible d'honorer d'une façon toute naïve, en suivant simplement, au mieux, les neuf prescriptions que voici:

Première règle: Chaque écrit, destiné à un perfectionnement collectif, et pouvant ultérieurement faire partie d'un corpus intitulé BESTIAIRE, sera établi de façon individuelle sous les relatives apparences d'un article encyclopédique ayant pour thème un animal fantastique.

Deuxième règle: Il débutera par le nom de l'animal, précédé d'un article défini, et se terminera par une mise en rapport de cet être avec un autre dont le nom, formant le dernier mot de l'ultime ligne, et l'article qui le précède seront mentionnés avec des points de suspension (en principe, dans le corpus, cette zone recevra le titre de l'écrit suivant).

Troisième règle: Il adoptera, en guise de titre, le nom de l'animal, exclusivement composé avec le plus grand nombre possible des lettres du mot BESTIAIRE.

Quatrième règle: Il choisira, pour ce nom, une combinaison de ces lettres capable de fournir approximativement un certain sens.

Cinquième règle: Il déterminera, à partir du sens ainsi produit, certains caractères majeurs de l'animal.

Sixième règle: Il se composera d'une série de neuf lignes, toutes faites de neuf mots.

Septième règle: Il manifestera au moins une fois, en les comportant à des places respectives notables, les lettres du mot de base, BESTIAIRE.

Huitième règle: Il présentera, si possible, au moins une mention capable d'assurer une désignation de certains des aspects matériels du mot de base, BESTIAIRE.

Neuvième règle: Il offrira, si possible, au moins une mention capable d'évoquer certain de ses propres aspects matériels hors ceux qu'il partage avec le mot de base, BESTIAIRE.

La première phase sera consacrée, sur plusieurs séances, à la lecture et à la récriture collectives, selon une méthode stricte, d'un des écrits qu'auront composé, dans cette optique, au préalable, certains participants.

La deuxième phase, au fil des séances suivantes, et en vue de pratiquer et de théoriser, s'agissant de l'interscrit, une variante paradoxale (dite l'inter(arthro)scrit), sera vouée à un ré-examen et à un accroissement de l'articulation pouvant réunir deux écrits composés dans les années quatre-vingt: L'eresit et L'esare.


L'ERESIT
 
l'érésit est une
Bête altière aux ailes ligneuses;
bistre, sa couleur l'
Exige au loin du tibre;
comme elle développe une
Scripturale stratégie, ses rites hérétiques
sont hypocritement réticulaires: elle
Torture les êtres par son
Bord Et Ses Textiles
Intersections. Avec Insistance, Rigueur, Elle
étire, de ses plumes
Acérées, en partant de la
gauche, neuf parallèles, qu'
Inévitablement recoupent, à angle droit,
de belles stries formant
Résille; souvent s'y abrite,
en bas, triste, capture
Extrême, autre bizarrerie, l... ...
(d'après E.H.)


L'ESARE

L'ésare type ressemble fort, apparemment, au risible Tab
Et le même air de bêtise semble leur caractéristique.
Symétrique partout, ne subsiste cependant qu'une des ailes.
A part cela le subtil volatile est vraiment parfait.
Rapport aux mœurs, il est bien le meilleur ami
Envisageable pour le très beau Satyre dont il sera
Toujours (bonheur des antithèses) un faire-valoir merveilleusement décati.
Inconvénient: il veut toujours, mais sans succès, vous imiter.
Bicolores, comme nonnes en messe, ils évoquent (l... ..e)

(d'après M.A.)


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