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DÉVELOPPEMENTS DURABLES
: NOUVELLES VOIX, NOUVEAUX PASSAGES
( PROSPECTIVE IX )
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DU JEUDI 14 JUIN (19 H) AU MERCREDI 20 JUIN
(14 H) 2007
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DIRECTION : Sylvain ALLEMAND, Nicole
BARRIÈRE, Edith HEURGON, Josée LANDRIEU
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GROUPE MIROIR : Valérie
BLANCHOT-COURTOIS, Brice DURY, Josée LANDRIEU, Martino NIEDDU, Thierry
RIBAULT, Philippe ZARIFIAN
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CERCLE DES PARTENAIRES : CNP,
Conseil Général de la Manche, Conseil Régional de Basse-Normandie,
DIACT, INRA, Groupe La Poste, RATP, VEOLIA WATER
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ARGUMENT :
Cette rencontre de prospective du présent vise à rendre compte de
nouvelles approches théoriques, pratiques, intellectuelles, culturelles
et artistiques du développement durable à travers le monde, des
approches dont on parle peu, mais qui, pourtant, contribuent à enrichir
la compréhension de ce développement et de ses enjeux.
Elle prolonge les deux précédents colloques qui ont abordé le
développement durable successivement sous l'angle des rapports entre
territoires et entreprises, Entreprises,
territoires: construire ensemble un développement durable de 2005
(publié sous le titre Le développement durable, c’est enfin du
bonheur, L’Aube, 2006) et de L'économie des services pour un
développement durable de 2006 (publié aux
Editions L'Harmattan, 2007). Elle souhaite élargir les débats,
d’une part, au-delà des trois piliers (environnemental, économique,
social) à toutes les dimensions du développement (humain, artistique,
poétique, cognitif, culturel), d’autre part, poursuivant la rencontre Civilisations et mondialisation: de
l’éthologie à la prospective de 2003 (publié sous le titre Vers des civilisations mondialisées? De
l'éthologie à la prospective, L'Aube, 2004), à la variété
des cultures et des pays.
Introduit il y a vingt ans par le rapport Bruntland, le développement
durable a fait son chemin de diverses façons et donne lieu à de
multiples déclinaisons ou manifestations qui, même s’il s'agit d’une
notion floue et transitoire, en font un enjeu dont la force s’impose
désormais à tous. Mais, de même que plusieurs mondialisations se
trouvent simultanément à l’œuvre, de même le développement est un
processus composite qui adopte des formes multiples caractérisées par
des problématiques, des modes de raisonnement, des critères et des
outils de mesure différenciés.
Au-delà des discours catastrophistes, mais avec la pleine conscience
d’un nécessaire ressaisissement, la prospective du présent s’efforce de
renouveler l’appareil conceptuel en privilégiant une pensée qui,
au-delà des raisonnements par opposition, naît dans le mouvement et se
construit dans l’action.
D’où l’intérêt de partir de lieux d’inventivité qui, plutôt que de
cloisonner les domaines, suscitent de nouveaux savoirs, de nouvelles
cultures du développement, lesquels se manifestent par des avancées
théoriques et des expériences pratiques, par des capacités d’influence,
d’entraînement ou d’exemplarité, par des effets sensibles sur les
corps, les sens, les imaginaires...
Pour peu qu’on sache les écouter, ce sont là autant de "voix" de
développements durables qui se font entendre et qui, d’ores et déjà,
peuvent constituer des réponses aux défis qu’il nous faut saisir. Ce
sont ces voix multiples, nouvelles parce qu’inattendues et
"in-entendues", que cette rencontre se propose de faire paraître et de
faire dialoguer:
- des voix de l'itinérance
qui naissent et s'expriment dans des expériences de passage d'un pays à
un autre, de traversée de diverses cultures, d'observation des
pratiques de vie quotidienne dans des pays différents et de la façon
dont sont conçus les développements durables;
- des voix de la création que
l’on peut "écouter" dans des formes "sensibles" d’artistes ou
d’amateurs témoignant à travers leur expérience d’autres manières de
concevoir un développement "souhaitable", qu’il s’agisse des arts de
l’image (cinéma, photo...), du théâtre, de la danse, de la poésie, mais
aussi dans toutes sortes de pratiques visant à stimuler la créativité
et l'énergie humaine;
- des voix de l'éducation
qui, par l'enseignement, la télévision ou la presse, transmettent des
savoirs et ouvrent à une "culture du développement durable" des
collégiens, des élèves d'écoles professionnelles, des téléspectateurs,
ou d'autres "publics"...
- des voix de la quotidienneté
enfin qui, à travers des expériences professionnelles et des
initiatives, mettront en évidence les enjeux qui se trament derrière
des pratiques aussi ordinaires que habiter, manger, bouger, vivre
ensemble...
L'organisation du colloque visera donc à:
- écouter ces multiples voix selon des modalités variées et à explorer
les idées nouvelles qui y sont en germe;
- favoriser le dialogue entre elles, afin de dégager des nouvelles
démarches pour penser les développements durables et agir dans cette
perspective;
- engager une réflexion sur la façon dont ces approches différentes
réinterrogent nos pratiques quotidiennes de production, de consommation
et du vivre ensemble;
- interpeller, à partir de ces points de vue, des économistes, des
écologistes, des responsables politiques ou d’entreprises sur la façon
dont ils pourraient prendre en compte ces nouvelles cultures et ces
nouveaux savoirs.
Pour chacune des voix étudiées, nous écouterons des témoignages, serons
invités à certaines expériences, débattrons d'initiatives allant dans
le sens des objectifs visés. Puis, après chaque séquence, une table
ronde organisée avec le "groupe miroir" permettra d'ouvrir le débat
afin d'examiner les leçons qui peuvent en être tirer quand aux théories
et les pratiques des DD.
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CALENDRIER DÉFINITIF :
Jeudi 14 juin
Après-midi:
ACCUEIL DES
PARTICIPANTS
Soirée:
Présentation du Centre, du colloque et des participants
Vendredi 15
juin
Matin:
Ouverture
Edith HEURGON:
Le développement durable, un nouvel art de vivre?
Josée LANDRIEU: Penser le monde
au pluriel
Des
voix de l'itinérance (avec projection
de films) (Modérateur: Sylvain
ALLEMAND)
Alain SAULIÈRE: Jardins dans la
crise, des réalités économiques différentes
Après-midi:
Philippe ZARIFIAN: L'individu
face aux mouvements du monde
Sylvain
ALLEMAND: Les voix de l'itinérance à partir de diverses
expériences (Passeurs d'espoir,
Africa Trek...)
Soirée:
Poésie
Hassan MAKAREMI: Voix de poésie
persane (présentation de l'atelier de réflexion poétique, animé avec Nicole BARRIÈRE)
Samedi 16 juin
Matin:
Des voix de
l'itinérance, table ronde avec le Groupe Miroir, animée par Josée LANDRIEU
Des
voix de la création (Modératrice: Nicole
BARRIÈRE)
Emma BATTESTI: L'art au
quotidien, l'art pour tous, ou comment partager l'art avec les
personnes qui n'y ont pas accès?
Claudine HUNAULT: "Écrire, Dire,
Se représenter ou Le geste de dire"
Après-midi:
Jeu
Kaléïdosco-poïetique, avec Régis LECŒUVRE (Luami CREER)
Micheline PUJOLLE-JACOTTIN & Olivier
WAHL: Accompagner le changement dans l'entreprise en
utilisant la peinture comme outil pédagogique
Valérie BLANCHOT-COURTOIS: Eden ou comment concilier
innovation technologique, développement économique et citoyenneté: vers
un modèle universel d'innovation sociétale?
Atelier de
réflexion poétique
Soirée:
L'Ogresse de Francine PELLAUD (avec le conseil de
Richard-Emmanuel
EASTES), représentation théâtrale interprétée par Violaine BREBION, suivie d’une
discussion
Dimanche 17
juin
Matin:
Des voix de la
création, table ronde avec le Groupe Miroir, animée par Josée LANDRIEU
Des voix de l'éducation (Modérateur:
Sylvain
ALLEMAND)
Table Ronde animée par Sylvain
ALLEMAND, avec Jacques BRÉGEON
(Préparer les dirigeants aux enjeux du DD (le Collège des Hautes Etudes
de L'Environnement et du Développement Durable)), Vincent ROGER (L'Université
populaire du Val de Marne) et Virginie
SEGHERS (Le DD dans les grandes écoles de commerce)
Après-midi:
Atelier de
réflexion poétique
Soirée:
Projection de films d'Alain SAULIÈRE
sur Des voix de
l'itinérance (suite)
Lundi 18 juin
Matin:
Des voix de
l'éducation, table ronde avec le Groupe Miroir, animée par Josée LANDRIEU
Voix
de la quotidienneté (Modératrice: Edith
HEURGON)
Jean-Robert
PITTE: La mondialisation, une chance pour la diversité des
saveurs
Après-midi:
Visite des haras de Saint-Lô avec Hassan
MAKAREMI, suivie d'une discussion sur le retour du cheval dans
la cité
Soirée:
Retour
collectif sur l'atelier de réflexion poétique
Mardi 19 juin
Matin:
Voix
de la quotidienneté: bouger, manger (Modératrice: Edith
HEURGON)
Marc HATZFELD: Manger, bouger,
parler, jouer, la contribution des jeunes des cités à la culture
quotidienne
Jean-Guy HENCKEL: Les Jardins de
Cocagne au coeur du développement durable
Philippe DESBROSSES, Thanh NGHIEM &
Jérôme VIRLOUVET: Agriculture et alimentation durables
Déjeuner:
Repas dégustation bio, préparé par l'Auberge Paysanne au
Mesnil-Rouxelin (Philippe ENÉE)
Après-midi:
Véronique MICHAUD: Bouger,
marcher dans la ville (le pas de la marche)
Catherine ESPINASSE: Bouger,
marcher dans la ville (le pas de la danse)
Caroline SPEIRS: Contribuer au
changement de comportement en matière de déplacement
Edith HEURGON & Catherine ESPINASSE:
Écouter les voix multiples des ados à Vitry, accompagner leurs
pratiques de danse dans la ville
Soirée:
Danse
Katia LÉGERET-MANOCHHAYA:
Théâtre, danse et poésie de l'Inde: un art de vivre l'impermanence
Mercredi 20
juin
Matin:
Synthèse,
table ronde avec le Groupe Miroir, animée par Josée LANDRIEU
Est-ce que ces nouvelles voix permettent de faire évoluer les théories
et les pratiques du DD?
Quelles leçons en tirer au plan économique, écologique et social pour
les entreprises et les collectivités?
Après-midi:
DÉPARTS
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RÉSUMÉS :
Emma BATTESTI:
L'art au quotidien, l'art pour tous, ou comment partager l'art avec les
personnes qui n'y ont pas accès?
"L’avenir du théâtre appartient à
ceux qui n’y vont pas encore": c’est le credo de Pierre
Debauche, grand homme de théâtre avec qui nous avons créé en 1994 à
Agen un théâtre quotidien de création qui fonctionne toujours, le
Théâtre du Jour. Depuis cette expérience fondatrice, je cherche non
seulement à porter, mais vraiment à partager l’art, avec les personnes
qui n’y ont pas accès, et ce à différentes échelles:
- un groupe d’usagers de la psychiatrie, qui travaillent en dehors de
l’hôpital pour monter des spectacles que nous présentons dans des
festivals amateurs;
- les quartiers défavorisés de Marseille: "Migration Blues", une série
de 5 spectacles sur 2 ans à partir d’interviews des habitants, joués
directement dans les quartiers, puis dans un théâtre;
- la ville de Marseille et l’ensemble de sa population: "la Massalia",
une série de spectacles de rue festifs réalisés durant 4 ans par les
marseillais pour les marseillais (2000 participants amateurs et 500000
spectateurs à chaque édition...).
- le pourtour méditerranéen: "Les ports de la Méditerranée" un
laboratoire de formation, qui a duré 5 ans, destinés à de jeunes
acteurs méditerranéens originaires de pays où le théâtre reste
problématique.
Une des conditions essentielles de l'existence et du succès de tous ces
projets est de les inscrire dans la durée, ce qui, hélas, est de plus
en plus difficile. Alors, comment faire pour soutenir la durabilité de
ce type de création artistique qui vise un développement harmonieux des
personnes et des territoires?
Valérie
BLANCHOT-COURTOIS: Eden ou comment concilier innovation
technologique, développement économique et citoyenneté: vers un modèle
universel d'innovation sociétable?
L’énergie a été de tous temps un enjeu structurant pour les
civilisations. C’est encore plus vrai aujourd’hui avec des sociétés
humaines dont les économies ont un recours massif à l’énergie pour se
développer et assurer leur croissance régulière. Les conséquences en
sont, d’une part, la raréfaction des ressources fossiles avec des
tensions économiques et géopolitiques à la clé, et, d’autre part, des
émissions beaucoup trop importantes de gaz à effet de serre dont les
effets induits pour les grands équilibres climatiques planétaires
commencent d’ores et déjà à se faire dramatiquement sentir. Afin de
sortir par le haut de la spirale énergétique et environnementale
négative dans laquelle nous sommes entrés aujourd’hui, il est urgent
d’innover en refondant les relations entre l’homme et l’énergie. C’est
sur ce constat et pour contribuer à relever ce défi énergétique que
l’association eden a été créée en 2004 à Sophia Antipolis par huit
personnes physiques aux compétences complémentaires dans l’innovation
et l’énergie.
Eden a
une approche systémique de l’innovation dans l’énergie en remettant
l’homme au cœur des décisions et des actions. Abordant de front les
aspects technologiques, économiques, sociologiques, politiques et
philosophiques, dans une vision résolument entrepreneuriale, eden porte
aujourd’hui un véritable projet d’innovation sociétale dont l’ambition
est de créer un espace favorable à l’émergence d’initiatives
entrepreneuriales afin de construire des systèmes énergétiques
durables. Incubateur d’idées, de projets et d’entreprises, s’appuyant
sur un think-tank, eden
poursuit un double objectif:
- développer la conscience
énergétique® des citoyens, les inciter à changer de comportement
et à passer à l’action notamment via des actes d’achat responsables;
- favoriser la création et le développement des jeunes entreprises innovantes de
l’énergie porteuses de produits/services en phase avec les attentes des
citoyens porteurs d’une conscience énergétique.
Les fondamentaux d’eden, ses
principales réalisations à mi 2007 et ses options pour l’avenir seront
explicités. On s’interrogera également sur l’applicabilité du modèle
d’innovation sociétale proposé à des domaines autres que l’énergie.
Philippe
DESBROSSES, Thanh NGHIEM & Jérôme VIRLOUVET: Agriculture et
alimentation durables
Manger est un acte essentiel pour chacun de nous: à la fois
indispensable et quotidien, moment de convivialité ou, à l'inverse,
source d'obésité, de surpoids et "malbouffe". Derrière l'acte de
manger, se cachent de grosses "machines": cultures intensives, plaines
uniformes, OGM, mais aussi circuits de distribution...; la course sans
fin pour "le pouvoir d'achat", avoir toujours plus pour moins cher,
nous transforme en victimes de la société de consommation.
Ainsi l'empreinte écologique d'un français est-elle de 3 planètes, dont
1 pour l'alimentation. Et la moitié de notre assiette, c'est du pétrole
et du carbone ! Une fraise importée en hiver, c'est 5 kilos de carbone
pour 1 kilo de fruit, et la moitié de notre poubelle est remplie
d'emballages permettant aux produits de faire des milliers de
kilomètres. Le consommateur aveuglé par le "discount" préférera acheter
l'agneau venant de Nouvelle-Zélande plutôt que de choisir l'agneau
local, émettant ainsi 200 à 300 kilos de carbone dans l'atmosphère pour
1 kilo de viande... sans parler du trajet en voiture pour aller à
l'hypermarché à 15 km de chez lui.
Inéquités Nord-Sud mais aussi Nord-Nord, pollutions et épuisement des
sols, disparition des terres agricoles et des petites exploitations,
innombrables gaspillages tout au long de la filière, le modèle
production / distribution / consommation de masse a rompu l'équilibre.
Des solutions existent, mais il est urgent de les mettre en
application: avec l'agriculture paysanne, qui remet l'homme au milieu
du système de production; le Bio, qui milite pour des cultures de
qualité, sans chimie ni OGM, reposant sur des savoir faire et des
sélections d'espèces adaptées ; les AMAP et les réseaux de producteurs
locaux. Avec la prise de conscience qui s'opère au niveau des
consommateurs, on peut espérer renouer ce lien, ténu, entre la terre,
le paysan, les cultures locales, la diversité, les circuits courts et
la qualité — voire même retrouver un certain art de vivre, en symbiose
avec nos écosystèmes et les saisons, en puisant dans l'incroyable
réservoir de savoir faire et d'ingéniosité que nous ont laissé les
traditions et les terroirs. Nous présenterons ces solutions en abordant
plusieurs sujets:
- agriculture paysanne et enjeux du bio (Philippe Desbrosses);
- empreinte alimentaire et modes de vie durables (Thanh Nghiem);
- illustrations dans la Manche avec le GAB 50 (Jérôme Virlouvet).
Pour joindre l'utile à l'agréable, nous proposons ensuite un déjeuner
Bio original, préparé par Philippe Enée (restaurateur près de
Saint-Lô). En préambule, il nous parlera de son métier et nous
expliquera le menu composé par lui-même et ses apprentis venus de
divers pays du monde.
Catherine
ESPINASSE: Bouger, marcher dans la ville (le pas de la danse)
Les pratiques sportives ou culturelles, impliquant le corps, sont
nombreuses. Elles comprennent la danse et font partie intégrante des
loisirs des urbains, comme en témoigne la fréquentation croissante de
structures sportives, culturelles, associatives ou privées... Par
ailleurs, danser est un besoin revendiqué surtout par les jeunes, qui
s’exprime essentiellement en "boîtes", discothèques, ou bien, dans des rave parties qui ont lieu hors des
villes, tandis que les aînés avaient jadis les bals populaires sur les
places des villages...
Aujourd’hui, les problèmes de santé, telle l’obésité, liés à la
sédentarité, ainsi que le vieillissement de la population, génèrent une
sensibilisation à l’entretien du corps, qui incite à repenser nos modes
de vie, de déplacement, à avoir recours aux modes doux, et peut-être,
aussi, à utiliser différemment les espaces publics dans la ville...
Cependant, si le "pas de la marche" est autorisé dans les espaces
urbains extérieurs, le "pas de danse" ne l’est pas, ou guère. Seule
l’émergence des arts de la rue, dont le hip-hop, né dans les banlieues,
et de pratiques spontanées, de danses issues d’autres cultures,
compense en partie, cet enfermement du corps dans l’univers urbain. Ne
s’agirait-il pas là de signaux faibles du présent, qui permettront dans
un futur souhaitable, de transgresser cet interdit implicite de
l’expression du corps dans la ville?
Nos marches ne constituent-elles pas déjà des formes d’expression qui
révèlent, en partie au moins, nos états d’âme et de corps, nos
scansions intérieures? Du pas de la marche, dans toute sa singularité
pour chaque sujet, au pas de danse, forme de communication non verbale
et d’art, source de spectacles urbains et de nouvelles formes de
convivialité, n’y aurait-il pas un passage à établir?
Marc HATZFELD:
Manger, bouger, parler, jouer, la contribution des jeunes des cités à
la culture quotidienne
Les jeunes des cités sont en large partie exclus ou rejetés de la
contribution culturelle. Déqualifiés par l'école et dès avant que
d'entrer dans la vie d'adulte par la perspective du chômage, ils le
sont aussi souvent par le langage, les codes de civilité, les façons de
s'aimer, de manger. Face à un monde qui leur est très hostile et qui ne
les reconnaît ni ne les connaît, ils ont dressé eux-mêmes, en guise de
mur, un système du mouvement quotidien totalement distinct et où ils
sont les seuls à pouvoir évoluer.
Dans ce système, les codes sont différents et cachés. Ils sont
analphabètes et le revendiquent ou le déplorent, mais ils savent jouer
de l'oralité avec une vivacité inconnue. Ils s'encapuchonnent comme
dans des burnous, ils mangent n'importe quoi à n'mporte quelle heure.
Ils renversent les code bienséants des relations entre hommes et
femmes, tutoient leurs profs, mentent avec un aplomb d'arracheurs de
dents, dansent des chorégraphies saccadées et athlétiques tandis qu'on
les croyait épuisés, sortent la nuit pour dessiner des messages
hiéroglyphes sur les murs longeant les voies ferrées. Que veulent-ils
dire?
Une civilisation qui ne comprend pas sa jeunesse est une civilisation
perdue. En dépit de leurs efforts pour brouiller les pistes, nous
sommes contraints de déchiffrer leurs gestes et leur mots. Ils
contiennent notre avenir et le leur, notre devenir commun. À travers
les constantes et les fondamentaux de leur langage, ils nous disent qui
ils sont mais aussi qui nous sommes, comment ils voient le monde que
nous leur livrons et ce qu'ils comptent en faire. Décodage en commun.
Jean-Guy
HENCKEL: Les Jardins de Cocagne au cœur du développement durable
Les jardins de Cocagne font du développement qu’ils espèrent durable
depuis des années sans le dire ou plutôt sans l’afficher. En
développant une action sociale, économique, environnementale et en
recréant du lien social dans la proximité, les Jardins de Cocagne se
situent résolument au cœur du développement durable. La charte en
vigueur depuis l’origine en fixant des grands principes intangibles le
confirme:
1. une vocation d’insertion sociale et professionnelle de personnes en
difficulté,
2. la production de légumes cultivés en agriculture biologique,
3. la distribution de ces légumes auprès d’adhérents consommateurs,
4. la collaboration avec le secteur professionnel.
Rappelons aussi que les jardins ne se sont pas arrêtés à ces grands
principes, certes fédérateurs mais trop imprécis pour ne pas prendre le
risque d’être pervertis. C’est d’ailleurs les griefs que l’on peut
faire à un certain nombre d’entreprises et d’associations qui préfèrent
surfer sur de grands principes ou se "rassembler" autour de chartes
avec lesquelles il est difficile d’être en désaccord. Des principes
dont on ne retrouve pas trace dans leurs actions quotidiennes... à quoi
bon afficher les droits de l’homme au mur de la pièce où on torture ou
persécute une personne?
Alors les jardins pour ne pas tomber dans le travers d’afficher des
principes contraires à ce qui se passe sur le terrain, n’ont ont eut de
cesse d’affiner cette réflexion, de la capitaliser et de la diffuser.
La démarche qualité, les différents guides notamment (accompagnement
socioprofessionnel, technique, adhérent...) participe à ce souci
d’avoir des convictions en lien avec les actions en répondant aux
questions: qu’entendez vous par là? Que faites-vous vraiment? Nous ne
nions pas la difficulté à mener de concert tous ces principes (social
et sociétal, économique, écologique), non pas par conviction, mais
parce que cela nécessite une vigilance de tous les instants dans la
gestion et les décisions quotidiennes. Cette manière de faire
réinterroge forcément nos principes de management, de gouvernance. Il
ne s’agit pas pour nous d’être simplement concerné par les principes du
développement durable, mais d’y être impliqué. Agir ensemble et
durable, passe par une vraie implication collective et
personnelle des acteurs.
Edith HEURGON
& Catherine ESPINASSE: Écouter les voix multiples des ados à Vitry,
accompagner leurs pratiques de danse dans la ville
Écouter les voix multiples des ados, accompagner leurs pratiques de
danse dans la ville, saisir leurs trajectoires de vie en "situations",
à des moments-clefs où se transforment les comportements, se
construisent des façons de "vivre ensemble" dans la cité, s’inventent
des formes artistiques et culturelles, autant de dimensions d’un
développement durable, conçu comme "art de vivre" qui intègre
développement personnel et social, développement territorial et urbain,
développement artistique et culturel...
L’adolescence est un âge de passages
où se construit progressivement l’autonomie des individus, où la mixité
et les brassages
intergénérationnels et culturels sont essentiels. Le jeune, au travers
d’expériences, découvre ses limites, en faisant jouer ses ressources
propres (son corps, son genre), son origine culturelle et son milieu
familial, ses relations aux autres (à ses copains), à son territoire, à
la société.
Les activités des adolescents sont marquées par les contraintes
temporelles du système éducatif. Leurs loisirs ont aussi tendance à
être structurés selon des temps programmés et encadrés. Des temps
libres et des lieux informels leur sont nécessaires pour construire les
"nous générationnels" (par exemple dans les quartiers), mais aussi des
lieux de rencontres et d’événements pour favoriser l’ouverture (aux
diverses échelles de la ville). C’est dire que les temps et les lieux
des activités de loisirs sont aussi importants que leurs contenus. Deux
moments
de passages sont étudiés: l’entrée au
collège qui ouvre à l’adonaissance, où l’autonomie est
recherchée par rapport au milieu familial en s’appuyant, moins sur un
"je", que sur des "nous générationnels"; l’entrée au lycée, qui correspond à
l’adolescence proprement dite, temps d’affirmation individuelle au sein
de codes sociaux qui jouent sur l’apparence et la séduction.
Cette réflexion s’inscrit dans le cadre d’une démarche conduite avec le
Conseil général du Val de Marne sur les rythmes de vie des adolescents,
avec l’hypothèse prospective
suivante: les adolescents, loin d’être seulement des problèmes, peuvent
nous apprendre beaucoup de choses sur le devenir de nos sociétés. Cela
exige de partir des questions qu'ils se posent, de les écouter en
situations pour appréhender leurs attentes, de les reconnaître (leur
soif de reconnaissance est immense), de profiter de leur regard pour
voir autrement, dans sa diversité, le monde dans laquelle nous allons
vivre...
S’agissant des situations des
adolescents du Val-de-Marne, on peut spécifier:
- un aspect générique: les activités (de loisirs) que les
adolescent(e)s exercent, au moment de leur entrée (au collège/au lycée)
et leur appartenance à des "nous familiaux" et à des "nous
générationnels";
- des aspects contextualisés: les pratiques et fabriques territoriales
des ados entre "nous familial" et "nous générationnel" dans divers
quartiers (logements, établissements scolaires, loisirs, ...).
Trois types de
questions concernent le développement durable comme nouvel art
de vivre:
- comment faire évoluer leurs comportements vers le "bien bouger" et le
"bien manger": d’une problématique de santé à la question du corps et à
son image dans la ville, dans le respect des différences de genres, de
générations et de cultures?
- comment bien vivre avec les autres? faire en sorte que les diversités
rencontrées soient porteuses, non seulement de violences, mais d’une
dynamique inventive où s’affirme la dimension multiple de la parole, de
la pensée et de la population?
- comment créer? faire en sorte que la "culture jeune" s’oppose à
l’adolescence considérée comme crise, en permettant aux ados de vivre
dans leur monde ? que les arts des cités, qui jouent sur la
dislocation, l’éphémère, la transgression, soient porteurs de germes de
futurs au travers notamment de leur processus de création, de leur
reconnaissance et de leur dialogue avec les arts conventionnels?
Les pratiques
de danse peuvent aider à mieux comprendre les adolescents au
travers des expériences qui leur font découvrir et éprouver leurs
capacités propres, au premier rang desquelles leurs corps, mais aussi
les diversités entre individus, les relations entre genres (les garçons
et les filles), en adoptant le regard des autres (travail à la fois sur
le "je" et sur diverses sortes de "nous"). Au-delà de l’activité
artistique, les temps et les espaces au sein desquelles elle s’exerce
sont essentiels à la construction de l’identité adolescente. Choisir
les pratiques de danse comme angle d’attaque doit permettre d’élargir
le champ d’investigation à d’autres activités culturelles ou sportives
qui en partagent certains aspects (rapport au corps, relations aux
autres, caractère programmé ou libre, choisi ou imposé) ou s’exercent
dans les mêmes espaces-temps, de manière à formuler certaines
préconisations à caractère plus général.
Le contexte
local de Vitry valorise la danse au travers de divers
équipements, événements et projets, portés par des acteurs engagés.
Mais, au-delà de Vitry, les résultats obtenus, dans la mesure où ils
parviennent à caractériser les espaces et les situations
socio-culturelles des familles, seront passibles de certaines formes de
généralisation.
Claudine
HUNAULT: "Écrire, Dire, Se représenter ou Le geste de dire"
L’individu existe et définit sa place dans une société à travers trois
sortes de messages: les messages du corps, ceux de la parole, ceux de
l’écrit. Par ces messages, il prend conscience de son identité en même
temps qu’il la crée.
Le travail dont il est question ici met en jeu l’écriture, la parole et
le langage du corps. Il s’adresse actuellement à des enfants en milieu
scolaire, considérés comme des personnes à part entière qui s’ouvrent à
un tiers, le tiers de la loi et le tiers multiple qu’est l’autre.
L’enfant considéré comme sujet et la question de son identité sont au
centre du projet. La pratique artistique, et profondément la création,
sont un champ privilégié d’observation et de mise en jeu de son
identité par le sujet lui-même.
Nous sommes en présence de trois scènes différentes: la scène où se
produit l’écrit, la scène où la parole se forme et s’adresse à l’autre,
la scène où le corps entier prend en charge le langage de l’enfant et
l’inscrit dans un espace de représentation. Ce que dit l’enfant, ce
qu’il n’ose pas dire, ce qu’il veut dire, passe d’une scène à l’autre
et dans chaque passage, se sculpte encore différemment. À chaque
passage, l’enfant prend le large en regard de sa parole. Il la donne à
entendre, à voir et s’éloigne de l’emprise qu’elle avait sur lui. Comme
en un double mouvement de travelling, l’enfant donne à sa parole
l’importance croissante d’un objet esthétique à partager, en même temps
qu’il s’en déprend. Dans certaines conditions qui déterminent la
possibilité d’une rencontre, l’enfant peut risquer sa parole sans être
en danger. Il peut même se risquer à dire le "rien" qui est en
lui ; ce rien qui serait inacceptable dans le processus d’acquisition
du savoir, devient ici un espace originel du poème. L’enfant s’autorise
à dire l’absence, son absence à lui et l’absence d’images, Il écrit à
partir du zéro de la perception. Comme le zéro il rend présente
l’absence. Comme lui, il compte.
Josée
LANDRIEU: Penser le monde au pluriel
Comment redonner souffle au concept de développement durable qui semble
aujourd'hui s'appauvrir tant il est banalisé et récupéré par les
instances de l'économie-monde? Comment lui garder sa force
d'alternative féconde? Comment éviter qu'il ne devienne le dernier
avatar de la mondialisation? La gouvernance mondiale tend d'imposer aux
peuples une "culture globale" qui sert les intérêts marchands. Cette
marche forcée vers une uniformisation des cultures appelle un
ressaisissement tout aussi important que l'est le ressaisissement
nécessaire face aux déséquilibres écologiques. La diversité des
cultures, des croyances, des expériences, des capacités créatives est
le bien commun de l'humanité. Penser le développement durable, c'est
donc le penser au pluriel, reconnaître ses diversités et leur droit à
être entendues, reconnues. De même qu'il n'y a pas une mondialisation
qui viendrait réduire en une globalité toutes les cultures du monde,
mais des mondialisations vécues par les différentes civilisations avec
leurs spécificités, il n'y a pas un développement durable possible,
normé, unifié dans ses formes, ses valeurs, mais des développements
durables, possibles et souhaitables. Pour aller vers ces
développements, il faut cependant écouter et reconnaître les voix de ceux qui ne sont pas
entendus, qui ne sont pas audibles dans le contexte d'une pensée
unique, fut-elle une pensée du développement durable:
- les voix de l'étranger, l'habitant de l'ailleurs, le résiliant qui
trouve dans les situations d'extrême détresse qu'il vit la capacité de
préserver ou de construire des liens, d'inventer du collectif pour
subsister et pour créer des richesses;
- les voix du poète, du peintre, du danseur, qui, par leur corps, leurs
perceptions, leurs lumières et leurs ombres intérieures se plongent
dans le monde, en captent le sensible et, de tous leurs sens,
s'inscrivent dans le mouvement, dans les transformations du vivant et
en orientent le cours;
- les voix de l'enfant qui sait les mots de l'indicible, qui exprime
ses cauchemars et ses peurs, et guide l'adulte hors de ses refoulements;
- les voix de l'inventeur qui bricole et fait naître, au-delà de
l'objet qu'il créé, un processus qui unifie sa pensée, son engagement,
son rapport à la matière, son rapport aux hommes.
"L'écoute" de ces multiples voix n'est pas facile, car il faut non
seulement les entendre, mais encore les sentir, les goûter, les voir,
les toucher. Pour développer notre conscience de mondialité, nous avons
besoin d'être traversés par le monde, nous avons besoin de tous nos
sens et pas seulement de notre esprit.
Des voix, donc, et des passages
aussi si l'on veut que cette multiplicité soit féconde: passages par
l'enseignement, par le partage, passages entre les générations, de
l'enfant vers l'adulte... Passages aussi entre le Sud et le Nord; entre
l'engagement individuel du bricoleur qui se confronte à la matière et
son engagement de citoyen. Mais, aussi, l'itinérance en tant que
passage entre notre territoire intime et le monde qui nous émerveille,
nous surprend, nous dérange. Une itinérance qui nous imbibe du monde,
déplace notre pensée, nous ouvre à l'invisible, met en harmonie notre
dedans et notre dehors. Autant de chemins possibles vers des
développements durables.
Katia
LÉGERET-MANOCHHAYA: Théâtre, danse et poésie de l'Inde: un art de vivre
l'impermanence
Cette tradition orale, transmise depuis plus de 2000 ans, est
répertoriée par l'UNESCO comme un élément fondamental "du patrimoine
immatériel de l'humanité". Loin d'être un divertissement ou une
codification figée, cet art véhicule des valeurs interculturelles et
humaines profondes, interrogeant des questions contemporaines
(écologie, droits de l'homme...). L'essentiel de cette sagesse pratique
consiste à placer en amont de toute parole une alliance rythmique entre
notre souffle et la gestuelle créative de nos mains.
Katia Légeret-Manochhaya est une artiste
internationale de Bharata-natyam (Inde du sud), maître de conférence en
science de l'art à l'Université Paris8, co-directrice du Laboratoire de
recherches CICEP Paris 8, consultante en entreprises.
Hassan
MAKAREMI: Voix de poésie persane (présentation de l'atelier de
réflexion poétique, animé avec Nicole BARRIÈRE)
Entamer un dialogue culturel par la lecture de la poésie de Hafez dans
sa langue et ses traductions.
Explorer le sens du poétique dans ses composantes vivantes qui
traversent le temps, l’espace et les cultures, à partir de la lecture
en langue persane et en langue française des ghazals de Hafez.
L’atelier de réflexion autour de la poésie que nous proposons
s’élaborera autour des variations de compréhension, de débordement du
poétique et de l’écriture voyageuse à laquelle nous convie Hafez.
La poésie de Hafez nous invite à un voyage vers le concept du temps dans la civilisation
persane. La compréhension du concept du temps chez Hafez, nous
donne une clé pour mieux se projeter dans la culture persane.
Cette ouverture s’inscrit dans le chemin qui nous mène à une réflexion
sur le développement durable. Développement durable, concept cher à
notre cité, a besoin d’être compris dans sa grande diversité, telle que
la notion du temps. Le temps, cette notion complexe et variée, dessine
aussi la présence de l’homme sur terre ainsi que le regard de l’homme
vers son passé et son avenir. Hafez et sa conception du temps nous
permettent une entrée dans ce concept en culture persane.
Dans les itinéraires secrets du poème ou la méconnaissance des
alentours, nous tenterons d’approcher les différentes faces du savoir
de l’humain. Dans l’idée de durée, la thématique envisagée est le temps
dans ses différentes compréhensions qui varient selon les cultures et
les religions (temps de la finitude avec un début et une fin ou temps
qui s’ancre dans un processus de transformation et de devenir). De ces
variations actives nous esquisserons une nouvelle réflexion sur la
durée, le durable dans l’exploration d’un espace poétique, entre
affinités et inventions que suscite en chacun la poésie de Hafez; en
démultipliant le sens, l’espace ainsi créé se fera voie et voix de
l’être nomade au rêve silencieux qui nous habite pour le porter dans
l’espace collectif de poésie qui permet le dialogue sensible de tous.
Nicole Barrière est poète et sociologue,
a publié de nombreux recueils de poésie traduits en persan, espagnol et
italien. Engagée pour les femmes et la paix, elle défend la
francophonie, participe au Pen Club et préside l'Association des Amis
de César Vallejo.
Hassan Marakemi est iranien, psychanalyste, en France depuis dix ans,
directeur de la stratégie des Haras nationaux, a fait plusieurs
articles et conférences sur Hafez. Trésorier de la Ligue pour la
défense des droits de l'Homme en Ira, il a édité deux livres en persan.
Véronique
MICHAUD: Bouger, marcher dans la ville (le pas de la marche)
La marche, plus qu’une caractéristique commune, est un bien commun à
tous les humains, urbains et ruraux. Mais on ne marche pas en ville
comme à la campagne ou dans ces zones périurbaines façonnées par et
pour la voiture...
La prise en compte du piéton dans les choix d’aménagement et les
projets urbains traduit à l’évidence une amélioration de notre regard
sur la ville. Elle réconcilie les notions d’espace et de flux et
mélange les fonctions urbaines. L’objectif est que la rue ne soit plus
une route où l’on circule, mais un lieu où l’on se déplace, s’arrête,
habite, travaille et se côtoie. La rue doit être multi-usage et
multi-visage, chacun de nous étant aussi un piéton... Cet objectif de
rééquilibrage et de partage de la rue n’est pas atteint partout, loin
s’en faut, car l’inversion des priorités entre la voiture et les autres
modes de déplacement — marche, vélo et transports collectifs — implique
un changement profond de notre vision.
Ce changement se traduit localement par le passage d’une échelle
routière à une échelle piétonne, par la réhabilitation de la voirie
urbaine, mais aussi par la redéfinition des usages, des usagers et des
espaces en ville. Ces vingt dernières années ont vu la production de
nouveaux savoirs-faire pour conduire ces évolutions. Mais les outils
techniques ne peuvent pas tout. Ils doivent être au service d’une
approche sensible de la marche et de la production des espaces au cœur
des mobilités urbaines. Affaire d’ambiance, de qualité d’usage,
d’accessibilité, de proximité...
Les enjeux relatifs à la marche sont donc multiples. Il s’agit, d’une
part, d’encourager un mode de déplacement efficace et complémentaire,
socle d’un système global de mobilité durable. Il s’agit aussi de
redonner l’envie de marcher à nos concitoyens pour leur bien-être
quotidien et leur santé, la sédentarité et son corollaire de
pathologies devenant un problème majeur de santé publique. Enfin, à
travers la marche et le modèle d’urbanité qui va avec, est également en
jeu, notre capacité à restaurer l’urbain au-delà des
centre-ville, là où il est absent, en luttant contre l’étalement de la
ville, en densifiant et en réparant, bref en se soignant. Et à n’en pas
douter, les circulations douces — la marche, le roller, le vélo... —
sont une médecine douce efficace au service de ce développement
soutenable de nos territoires.
Micheline
PUJOLLE-JACOTTIN & Olivier WAHL: Accompagner le changement dans
l'entreprise en utilisant la peinture comme outil pédagogique
L'entreprise est un espace réglementé où tout est cadré en vue
d'atteindre des objectifs définis alors que l'art propose un lieu où
rien n'est encore défini, où peut jaillir la création. Nous avons
travaillé ensemble à dépasser cette antinomie apparente pour mettre en
place au sein d'une grande entreprise des stages utilisant la peinture
comme moyen de formation.
Beaucoup d'entreprises sont en profonde mutation. Les salariés y sont
sollicités par des nombreuses transformations. Or, la peinture, en
faisant vivre un processus de création, permet d'expérimenter et de
comprendre le fait de vivre un changement, dans un contexte sans enjeu,
ce qui en facilite l'intégration. À partir de leur découverte de la
peinture et de la création, les salariés étonnés et bouleversés peuvent
questionner leurs attitudes face au travail. Chacun d'eux peut vivre
alors plus facilement les périodes de mutation tout comme l'entreprise
peut assure sa propre évolution avec plus de souplesse.
Alain
SAULIÈRE: Jardins dans la crise, des réalités économiques différentes
Que ce soit en Ouganda, à Kinshasa, ou au Burkina, c’est à l’intérieur
de situation de crises (crises dues à la guerre, aux bouleversements
politiques, à la situation économique nationale et internationale) que
les groupes filmés (village ou quartier) ont mis en œuvre, par
nécessité, des formes de vie vraiment intéressantes. Nos grilles
d’analyse, qui séparent les approches en laissant à la la rationalité
économique une place prépondérante, sont pour ces situations totalement
inopérantes. Nous rencontrons dans ces "jardins dans la crise", un
"bricolage" dans tous les domaines avec une interpénétration de divers
niveaux: culturel, économique, social, éducationnel. Une autre lecture
est donc nécessaire si l’on veut y comprendre quelque chose et surtout
en tirer quelques enseignements. J’étais allé dans ces pays pour filmer
des expériences, j’y ai trouvé bien plus que ça; c’est cela que nous
pourrons entrevoir dans les films et apporter à la réflexion de ce
colloque.
Caroline
SPEIRS: Contribuer au changement de comportement en matière de
déplacement
Aujourd’hui, se déplacer est un besoin essentiel, tant au plan social
qu’économique. Dans nos sociétés modernes de la course aux gains de
temps, la mobilité des personnes est un enjeu primordial, aux
implications nombreuses. Dans le même temps, on observe avec inquiétude
l’augmentation des pollutions et nuisances locales, surtout en milieux
urbains, et des bouleversements climatiques dus notamment aux émissions
de gaz à effet de serre, dont les transports représentent la première
source en France. Face à ces constats, de nombreuses possibilités de
solutions existent. Parmi celles-ci, une association francilienne
développe depuis plus de 3 ans des projets de "Centrales de Mobilité".
Il s’agit d’espaces d’accueil du public d’un genre nouveau, mêlant
informations et services à la mobilité, et dont les objectifs sont à la
fois environnementaux (sensibilisation pour de nouveaux usages,
rationalisés, de la voiture, et pour des reports vers les modes
"alternatifs": vélo, transports en commun, etc.) et sociaux
(désenclavement de zones urbaines mal desservies), mais également
économiques (création d’activité et d’emploi de l’économie sociale et
solidaire).
Philippe
ZARIFIAN: L'individu face aux mouvements du monde
Sortant de la problématique sociologique traditionnelle, qui reste
centrée sur le couple "individu" et "société", cette dernière étant
souvent assimilée aux institutions de l’État-Nation, cette intervention
traitera de la manière dont un individu peut appréhender directement
les mouvements du monde contemporain. Elle partira de l’expérience
personnelle de l’auteur, des impressions et analyses qu’il a retirées
de séjours réalisés dans trois pays: Iran, Brésil et France. Elle
mettra en valeur les contrastes entre ces pays et en particulier
s’attachera à faire ressortir l’art de vivre qui les caractérisent, en
mettant en parallèle des situations de progression et des situations de
franche régression. C’est progressivement que l’on fera apparaître le
concept sociologique de mondialité, défini comme l’expérience que nous
faisons de notre appartenance à un même monde, à une même humanité
concrète, saisie à la fois dans la communauté de ses problèmes et dans
la diversité des attitudes actuelles face au vivre.
Jeu
Kaléïdosco-poïetique, avec Régis
LECŒUVRE (Luami CREER)
Petit texte de présentation: [sans oublier de respirer!]:
Ce qui me plaît dans l'ingénieur
C'est le génie du créateur,
L'intelligence pour comprendre
La complexité qu'il engendre,
La capacité d'analyser
Le but réellement visé,
La possibilité d'expliquer,
En toute simplicité,
Pourquoi nous sommes nés
Et comment l'on renaît.
L'enjeu est essentiel,
Pas besoin d'étincelles,
C'est toute une alchimie
D'ingrédients de la vie.
Chacun apporte les siens
Et ses besoins au quotidien.
Il y a certes une recette
Mais elle reste bien secrète.
Jouons au bon sens
Digne de notre naissance,
Faisons respirer notre esprit
Et les idées qu'il décrit,
Dansons inexorablement
En rythme et honnêtement,
Rions, c'est bien humain,
Ensemble, soir et matin.
Vivons notre ère
Toujours extraordinaire,
Préférons deux ailes à une
Pour nous approcher de la lune,
Rêvons du lendemain
Avant que ce (ne) soit la fin,
Voyageons dans notre monde
Portés par un joli vol d'onde.
Le binaire est dépassé,
La relation trine l'a remplacé,
Le monde a été créé
Pour être sans cesse recréé,
A chacun sa mission
Et ce n'est pas une illusion,
Chacun est responsable
Sinon c'est coupable.
Pour innover, sinon mourir,
Il est urgent de s'unir,
Les alliances stratégiques
Ont un pouvoir quasi-magique,
Soyons en les médiateurs
En ouvrant notre coeur,
Notre salut plein d'altruisme
Agrandit notre dynamisme.
luami ... c'est lui avec une âme dans le monde de la conscience!
L'Ogresse
de Francine PELLAUD (avec le
conseil de Richard-Emmanuel EASTES),
représentation théâtrale interprétée par Violaine BREBION, suivie d’une
discussion
Occidiane est une princesse bien gourmande. Si gourmande qu'elle en
devient énorme. Si énorme qu'elle doit sans cesse agrandir ses
châteaux. Pour subvenir à son appétit, tous les gens du royaume, puis
tous les gens de la Terre cultivent, élèvent, détuisent...
Comment tout cela va-t-il finir? Occidiane se rendra-t-elle compte que
des gens meurent de faim pour subvenir à ses propres besoins? En
tiendra-t-elle compte? S'en moquera-t-elle?
L'Ogresse, un conte allégorique sur le thème de la lutte contre les
effets pervers de la croissance économique à tout crin.
Un conte dont c'est le public lui-même... qui choisit la fin!
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